De cet été je garde
Cote d'azur
C'est l'un des plus beaux étés de ma vie, et l'un des plus sombres à la fois.
Après les enfants en juillet à Dampierre,
toute la famille part en vacances au mois d'août.
Mes parents ont loué une maison à Roquebrune Village au Cap-Martin c'est un petit bourg médiéval tout en ruelles, et en escaliers de pierres, interdit à la circulation.
La plage est en contre-bas, nous prenons nos repas dans la jardin ombragé de lauriers et de palmiers.
Mon frère A. est en conflit avec mes parents et à table en un mot il traite ma mère de folle, mon père toujours si calme pourtant lui donne une gifle magistrale et pour plusieurs jours A. devra se promener avec des lunettes de soleil pour cacher un coquard.
Les premiers souvenirs de Paul Leroyer.
Ami de longue date de mes parents, il est mort le 2 mai vers 1986, bien après son ami, mon père.
Originaire d'une famille bourgeoise du Vésinet, il est pour moi, à l'époque, où remontent mes premiers souvenirs de lui, le représentant de l' anarchiste et de l'écologiste bien avant que le monde y pense, et moi qui ne sait pas qui je suis, déjà je suis attirée par l'esprit de cet homme hors du commun.
A ce moment il vit avec sa femme Suzy et son fils Christian à Monaco, car il crée le zoo dans la principauté monégasque. Ils vivent dans de grandes caravanes blanches sur un terrain et le soir nous jouons à cache-cache au milieu des arbres et des loups blancs en liberté.
Il raconte que les chimpanzés dressés par lui saluent le matin la princesse Grace en se masturbant.
Je regarde Christian avec les yeux d'une adolescente de treize, et je suis amoureuse, il a deux ou trois ans de plus que moi.
A la rentrée suivante au Sacré-Cœur, un soir à l'étude je suis surprise en train de lui écrire et la soeur m'ordonne de lui remettre ce papier.
Je le mange, c'est un de mes premiers gestes de révolte.
Cet été tout en ombre et lumière.